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22 novembre 2017 3 22 /11 /novembre /2017 09:50
Dmitri Hvorostovsky (16 octobre 1962 - 22 novembre 2017).

Rendre hommage, c'est accepter l'inacceptable, commencer un impossible deuil. Et moi, je ne veux pas de cela, pas avec toi, Dima. Parce que, non, tu n'es  pas mort. Il est simplement impensable que tu le sois. Ces quelques lignes ne seront pas un "hommage" au sens nécrologique du terme, d'autres s'en chargeront. Ceux qui croient tout ce qu'on leur dit...

Donc je vais faire court, parce que je veux simplement te redire merci. Ce merci que je t'ai adressé trop rapidement la dernière fois que j'ai eu la chance de te rencontrer, au Châtelet en novembre 2016, où ton Credo de Iago avait sonné comme une révolte. Merci d'être qui tu es, pas simplement un artiste d'exception, pas seulement un sublime baryton, peut-être pour moi celui qui offre le chant le plus bouleversant, le plus pur aussi, de tous ceux de ta génération. Toi que je suis et que j'aime depuis ton fabuleux Yeletski niçois en 1989, dont j'avais pu me procurer un enregistrement et qui m'avait ébloui. Au-delà de ton inoubliable Oneguine, de tous tes rôles verdiens (ah ! ton Germont à Bastille il y a déjà trois ans...), au-delà du sublime conteur des mélodies de ton pays, merci avant tout d'être toi, Dima, merci de  dégager cette chaleur, merci pour ton sourire qui semble être la définition-même de ce que doit être un sourire : la continuité de l'offrande que ton chant a portée. Comme il est le témoin du combat que tu mènes depuis plus de deux ans, et que tu as toujours gagné. Et tu sais, il n'y a pas de secret. Il n'est jamais très bon, en principe, de faire l'unanimité. Même dans les louanges. Mais pour toi, la chose est différente. Tu es une exception, tout le monde t'aime, on ne peut que t'aimer. À commencer par tes collègues, qui sont pour toi tous des amis, sans calcul aucun, dans la plus grande franchise, sans la moindre jalousie. Tous ceux que tu as côtoyés un jour sur une scène et qui sont aujourd'hui ravagés, parce qu'ils pensent que cette stupide annonce est vraie. Et tous les amoureux de ce qui est beau dans l'art si difficile, si cruel parfois, du chant et que l'on nomme le public qui, eux aussi, sont bouleversés parce que trop crédules. Non, à tous ceux-là, il faut dire la vérité. Tu chantes encore, tu donnes encore, tu souris encore et, comme le murmurait Brel, tu "frères" encore. Rassure-les, s'il-te-plaît. Moi, ils penseraient que je rêve...

Allez, mon Dima, je te laisse te reposer...Je vais t'écouter une nouvelle fois...

T'écouter, et te regarder sourire pour tenter d'oublier que je ne peux que pleurer.

La divine surprise du gala du Met, en mai 2017.

Le bouleversant hommage du public du Met, lors de son retour à la scène le 25 septembre 2015.

 

Moscou, 11 mai 2015. Regardez bien les paroles...

 

J'ai plaisir à te dire que la nuit sera longue à devenir demain...

 

© Franz Muzzano - Novembre 2017. Toute reproduction interdite sans autorisation de l'auteur. Tous droits réservés.

 

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commentaires

S
Très beau texte, merci, cher ami ! Je me suis permis de le reprendre en capture d'écran sur mon blog, dans mon petit hommage personnel à ce magnifique artiste...
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F
Merci, Stefano...
D
Quelles belles paroles ! Dimtri a quitté notre matière terrestre, mais bien sûr son esprit est arrivé là où il devait aller et il sera près de nous longtemps ! demandons lui de nous aider, nous mais bien évidemment sa famille, ses proches et toute la famille lyrique ... de là où il est, il le fera ... merci Dimtri
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A
Merci cher Franz pour ces belles paroles qui mettent un peu de baume à nos cœurs meurtris !Dima est quelqu'un d exceptionnel et il est dans nos cœurs pour toujours !Trés heureux également d avoir pu assister à son émouvant concert au Chatelet en Novembre dernier !
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Présentation

  • : Les Chroniques de Franz Muzzano
  • : Écrivain, musicien et diplômé d'Histoire de la Musique, j'ai la chance, depuis plus de 40 ans, de fréquenter les salles de concerts et les maisons d'opéras, et souvent aussi leurs coulisses. J'ai pu y rencontrer quantité d'artistes, des plus grands aux plus méconnus. Tous m'ont appris une chose : une passion n'a de valeur que si elle se partage. Partage que je vais tenter de vous transmettre à travers ces chroniques qui relateront les productions que j'ai pu voir ou entendre (l'art lyrique y tenant une grande place). Mais aussi les disques qui ont contribué à me former, tout comme les nouveautés qui me paraîtront marquantes (en bien ou en mal). J'évoquerai aussi certaines grandes figures du passé, que notre époque polluée par les "modes" a parfois totalement oubliées. Je vous proposerai aussi des réflexions sur des aspects plus généraux de la vie musicale. Tout cela dans un grand souci d'impartialité, mais en assumant une subjectivité revendiquée. Certaines chroniques pourront donc donner lieu à des échanges, des débats contradictoires, voire des affrontements qui pourront être virulents. Tant que nous resterons dans la courtoisie, les commentaires sont là pour ça. Et vous êtes les bienvenus pour y trouver matière à vous exprimer. En n'oubliant jamais que la musique n'est rien sans les artistes qui la font vivre et qui nous l'offrent. Car je fais mienne la phrase de Paul Valéry : "Aujourd'hui, nous n'avons plus besoin d'artistes. Mais nous avons besoin de gens qui ont besoin d'artistes".
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