Rendre hommage, c'est accepter l'inacceptable, commencer un impossible deuil. Et moi, je ne veux pas de cela, pas avec toi, Dima. Parce que, non, tu n'es pas mort. Il est simplement impensable que tu le sois. Ces quelques lignes ne seront pas un "hommage" au sens nécrologique du terme, d'autres s'en chargeront. Ceux qui croient tout ce qu'on leur dit...
Donc je vais faire court, parce que je veux simplement te redire merci. Ce merci que je t'ai adressé trop rapidement la dernière fois que j'ai eu la chance de te rencontrer, au Châtelet en novembre 2016, où ton Credo de Iago avait sonné comme une révolte. Merci d'être qui tu es, pas simplement un artiste d'exception, pas seulement un sublime baryton, peut-être pour moi celui qui offre le chant le plus bouleversant, le plus pur aussi, de tous ceux de ta génération. Toi que je suis et que j'aime depuis ton fabuleux Yeletski niçois en 1989, dont j'avais pu me procurer un enregistrement et qui m'avait ébloui. Au-delà de ton inoubliable Oneguine, de tous tes rôles verdiens (ah ! ton Germont à Bastille il y a déjà trois ans...), au-delà du sublime conteur des mélodies de ton pays, merci avant tout d'être toi, Dima, merci de dégager cette chaleur, merci pour ton sourire qui semble être la définition-même de ce que doit être un sourire : la continuité de l'offrande que ton chant a portée. Comme il est le témoin du combat que tu mènes depuis plus de deux ans, et que tu as toujours gagné. Et tu sais, il n'y a pas de secret. Il n'est jamais très bon, en principe, de faire l'unanimité. Même dans les louanges. Mais pour toi, la chose est différente. Tu es une exception, tout le monde t'aime, on ne peut que t'aimer. À commencer par tes collègues, qui sont pour toi tous des amis, sans calcul aucun, dans la plus grande franchise, sans la moindre jalousie. Tous ceux que tu as côtoyés un jour sur une scène et qui sont aujourd'hui ravagés, parce qu'ils pensent que cette stupide annonce est vraie. Et tous les amoureux de ce qui est beau dans l'art si difficile, si cruel parfois, du chant et que l'on nomme le public qui, eux aussi, sont bouleversés parce que trop crédules. Non, à tous ceux-là, il faut dire la vérité. Tu chantes encore, tu donnes encore, tu souris encore et, comme le murmurait Brel, tu "frères" encore. Rassure-les, s'il-te-plaît. Moi, ils penseraient que je rêve...
Allez, mon Dima, je te laisse te reposer...Je vais t'écouter une nouvelle fois...
T'écouter, et te regarder sourire pour tenter d'oublier que je ne peux que pleurer.
La divine surprise du gala du Met, en mai 2017.
Le bouleversant hommage du public du Met, lors de son retour à la scène le 25 septembre 2015.
Moscou, 11 mai 2015. Regardez bien les paroles...
J'ai plaisir à te dire que la nuit sera longue à devenir demain...